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duisait. Ce poney-là a peur ; il se cabre et l’amazone effrayée se jette sur la tête d’une grosse dame qui avait une forêt de cheveux crêpés, frisés, tire-bouchonnés, enfin un tas d’histoires sur la tête, quoi ! La dame se débat ; la guenon fourgotte[1] les cheveux et, comme elle était en colère, elle arrache toute la perruque de la grosse, pièce à pièce ! Il y avait des faux cheveux, fallait voir ! peut-être plus de deux livres pesant ! tout le monde se tenait les côtes.

Bravo ! l’amazone ! qu’on lui criait ; elle est jalouse de la perruque et elle se venge.

— Mes crêpés ! hurlait la grosse dame, mes boucles ! mes frisons ! Elle m’arrache tout, cette horreur de bête ! Gusman, mon pauvre mari, au secours ! sauve ton Isménie…

Le gros monsieur qui s’appelait Gusman tâche de faire partir la guenon. Elle se rebiffe et v’lan ! elle lui allonge une calotte épouvantable. Gusman se fâche, réplique ; les voilà à se donner des taloches pour de bon ! L’arrivée du maître avec son grand fouet a tout apaisé ; il avait réussi à se faire un passage parmi les spectateurs qui entouraient la grosse dame et les combattants. À sa voix la guenon s’est calmée, a lâché Gusman et la perruque ; tout le monde s’est en allé, riant encore de toutes ces bonnes farces !

Me voilà à bout de papier et de force épistolaire. Je vous r’écrirai de Blidah, cher Monsieur et Vicomte, pour vous narrer mes impressions de voyage.

  1. Pour « fourrage » (c’est un mot Normand).