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ragement sur une touffe de gazon. À peine avait-il touché la terre qu’il se releva soudain en bondissant comme une balle élastique et en poussant un hurlement sauvage.

Crapotin, effrayé. — Eh bien ! il devient enragé ! Qu’est-ce qu’il y a, Philéas ?

Philéas, criant. — Ah ! ah ! quelle blessure ! quels élancements… du secours, mes amis !

Grenadier, surpris. — Où donc, une blessure ? qui est-ce qui vous a touché, Philéas ? je ne vois pas de bête par terre, pourtant !

Philéas, gémissant. — Si, oh ! si, je suis transpercé…

Crapotin. — C’est peut-être dans la touffe de gazon ! (Il regarde.) Ah ! Saindoux, mon ami, une bécasse ! vous avez tué une bécasse !

Philéas, stupéfait. — Comment, j’ai tué une… mais je n’ai rien tiré.

Grenadier. — Crapotin a, ma foi, raison. Regardez ! (Il ôte de la touffe d’herbe une bécasse.) La voilà, le bec brisé et plate comme une feuille de papier, la pauvre bête !

Philéas, aigrement. — Eh bien ! plaignez-la, je vous le conseille, quand son bec vient de me poignarder ! (Il fait des contorsions.) Je trouvais qu’une épingle faisait mal, mais il faut avoir six centimètres de bécasse dans le corps pour savoir ce que c’est qu’une vraie piqûre !

Crapotin. — Mais ça ne doit pas être profond, mon cher !

Philéas, geignant. — Ah ! ça doit avoir pénétré jusque bien près du cœur, mon pauvre ami !