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Tout en grommelant, le triste Rapinot s’éloigna avec la faisane morte, sans vouloir accepter les offres d’argent que lui faisait Crapotin, ni ses excuses embarrassées.

Philéas avait écouté la discussion avec une joie déguisée, mais voulant consoler son ami tout penaud, il le prit par le bras.

— Allons ! mon cher, s’écria-t-il, un peu de philosophie, saperlotte ! il nous reste mon râle ; ainsi, de la joie !

Au même instant, la carnassière de Saindoux s’agita. Le gros chasseur tourna la tête pour se rendre compte de ce mouvement inattendu ; avant qu’il ait pu faire un geste, le râle de genêts, vivant et des plus alertes, s’était élancé hors de la carnassière en poussant un cri de triomphe.

Philéas. — Dieu ! mon râle… il était vivant !

Grenadier. — Courons après !

Crapotin, riant. — Ah ! ah ! Saindoux, vos victimes se portent bien, dites donc !

Philéas, exaspéré. — Le scélérat ! après m’avoir déjà tant tourmenté !… Il ose vivre encore ! Mais je l’aurai ou j’y perdrai mon renom de chasseur…

Les trois amis s’élancèrent à la poursuite de l’oiseau ; le râle, sentant le danger, ne se contenta plus de courir et, se voyant poursuivi si chaudement, il s’envola, laissant les chasseurs furieux.

Philéas perdant tout espoir, éreinté d’ailleurs de sa course furibonde, se laissa tomber avec décou-