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Je sais ce que je fais… (Il se cogne la tête à un arbre.) N’humiliez pas un honnête homme ! (Il s’éloigne dans le bois.) Personne ne pourra jamais prouver… (dans le lointain) que je ne suis pas un honnête homme !… (Il disparaît.)

Les rires des spectateurs répondirent à cette déclaration solennelle. Le reste des musiciens se débanda ; les uns consentirent à prendre le bon chemin, celui de la grande route, pour retourner chez eux ; les autres s’établirent dans des fossés, protestant qu’ils étaient arrivés à leur logis et qu’ils n’en bougeraient pas pour un empire.

Pendant ce temps, on entendait dans les bois une note lointaine de la flûte égarée ; un coup formidable de la grosse caisse, qui errait non loin de là, répondait immédiatement à cette tentative musicale. Saindoux, resté seul, s’écriait alors, moitié riant moitié fâché :

— Allons bon ! voilà mon orchestre qui fait des siennes !

M. et Mme de Marsy venaient de partir avec leurs enfants ; mais ces notes lointaines semblaient à tous si comiques, que pendant quelque temps on fit aller les chevaux au pas pour entendre ce concert improvisé.

À force de marcher au hasard dans la forêt, la grosse caisse et la flûte se rejoignirent : le premier s’assit alors sur un tronc d’arbre, le second dans une rigole heureusement à sec et le dialogue suivant s’engagea, entremêlé de coups de grosse caisse et de notes aiguës lancées capricieusement par la flûte.

La grosse caisse. — Es-tu… boum !… boum !… mon ami ?