vous lé férai voir cé soir, si vous voulez. Vous jugérez si c’est un bel animal. Mé permettez-vous dé passer la nuit sous lé hangar ? il se fait tard…
Au grand déplaisir de Polyphème, Philéas accorda cette permission au Bordelais. Le coiffeur, désappointé, demanda à retourner à Moscou, mais Philéas l’entraîna dans un coin, lui parla bas avec feu et le coiffeur s’inclina en disant :
— Je ferai tout ce que monsieur voudra.
Saindoux alla ensuite retrouver Polyphème et il écouta tranquillement les gronderies de ce dernier. Elles duraient encore lorsque Sagababa entra et dit :
— Si maître à moi veut regarder ours ? moi le montrer à maître à moi.
— Tiens ! s’écria Philéas, enchanté de se soustraire aux blâmes de Polyphème ; allons donc voir cette fameuse bête, Tueur, voulez-vous ?
— Non, répondit Polyphème avec impatience. Je ne suis pas curieux de ce spectacle. Allez-y seul, si vous voulez.
Philéas ne se le fit pas dire deux fois. Il suivit Sagababa et monta avec lui dans la charrette. Il y vit dans le fond, attaché par une chaîne, un bel ours brun qui était couché et qui étendit une patte d’un air féroce.
— Oh ! là ! là ! marmotta Philéas en descendant précipitamment, il n’a pas l’air commode ! ce sera ennuyeux, ce soir, si…
Il s’arrêta en hochant la tête.
— Bah ! ajouta-t-il, je ferai son affaire en un clin d’œil…