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— Ze respire ! disait-il. Z’étais sot de me croire poursuivi. Il est évident que mon cousin a bien pris la soze. Pourquoi aussi ne m’a-t-il pas donné ces malheureux seveux ? Aller gaspiller cela dans les mains ignorantes d’un vil barbier, au lieu de les déposer dans les mains scientifiques de son parent, de son ami… Son ami ! Ze ne dois plus l’être à présent ! Z’ai eu tort de lui parler de Mme Tussaud et de l’inscription destinée à sa sevelure. Ça a dû le fâsser. La plaisanterie (car c’était une plaisanterie) était trop forte !… mais… ze voulais le faire enrazer, le punir de sa mauvaise volonté. Ze voudrais savoir quelle figure il fait à l’heure qu’il est….

Narcisse, le domestique auvergnat, avait écouté paisiblement son maître, tout en se servant d’une longue-vue dont le docteur était toujours muni. À la fin de ce soliloque, il dit d’un ton tranquille, sans quitter de l’œil l’objet qu’il fixait :

— Monchieur Chaindoux a la mine d’un homme joliment en colère, allez !

— Hein ! s’écria le docteur en bondissant ; où vois-tu ça, toi ?

— Là bas, dans che petit bois, répliqua paisiblement Narcisse. Il vient de che pochter près de chon nègre, Chagababa, comme on l’appelle. Ch’est-il un nom chrétien, cha, Monchieur ?

Mais le docteur effaré ne songeait pas à lui répondre. Il avait regardé à son tour et il apercevait distinctement la tête de Sagababa. C’en fut assez pour tout deviner… Il se vit déjà pris, traqué, traité Dieu sait comment ! par Philéas exaspéré. Il se souvenait de la colère de Saindoux à Marseille, colère