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Lorsqu’ils s’en aperçurent, ils changèrent de direction et voulurent revenir rapidement à l’auberge.

Mais le cheval, fatigué, refusa d’aller autrement qu’au pas et les voyageurs essayèrent vainement de le faire trotter. Leurs cris et leurs coups furent inutiles. Pendant une heure ils durent se résigner à marcher comme un enterrement, dans une obscurité croissante. Les nuages assombrissaient le ciel de plus en plus. Un éclair flamboyant fit sortir tout à coup le cheval de sa torpeur ; il se mit au trot d’abord, au galop ensuite, au grand contentement de Polyphème qui se fiait à son instinct, mais à la grande terreur de Philéas que cette course folle épouvantait.

— Arrête !… holà… ho !… ho là ! criait-il en tirant sur les guides. Tu vas nous fracasser. Tirez avec moi, Tueur ; nous sommes en danger de mort, c’est sûr ! cette bête devient infernale…

— Et les morts vont vite ! remarqua Polyphème d’un ton lugubre.

— Saprelotte ! s’écria Philéas en frissonnant, vous avez de fichues idées, mon ami. Ah ! s’il m’arrive malheur, je veux vous dire mes dernières volontés…

Un éclat de rire de Polyphème interrompit Saindoux.

PHILÉAS, scandalisé. — Vous riez, vous osez rire… Eh bien ! si c’est vous qui mourez et moi qui vous survis, vous ne prévoyez donc rien à demander ? rien à… aïe !…

Sans s’en douter, les promeneurs étaient arrivés à l’auberge et le cheval, en entrant au grand galop