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La vieille poussa des cris de détresse ! Ceux qui l’entouraient se jetèrent sur Sagababa. Philéas et Polyphème s’élancèrent au secours du petit nègre et la mêlée fut complète !

Heureusement pour les voyageurs, le guide mit en peu de mots les principaux habitants au courant de ce qui s’était passé, et après avoir séparé les combattants, les explications commencèrent. Elles furent longues et laborieuses, l’impétueux Philéas interrompant à tort et à travers ; la servante était de son côté bavarde comme une pie et entêtée comme une mule.

Le curé, qui était arrivé pour tout pacifier, avait beau vouloir la faire taire, il ne pouvait y réussir et la persuader de son erreur.

— Non, non, monsieur le curé, répondait-elle avec obstination. Vous êtes la dupe de ces deux brigands. Ils ont un singe qui parle ; ça prouve qu’il est plus pervers que les autres… Et regardez ce gros qui traîne la jambe ! C’est un galérien échappé qui avait encore les fers aux pieds hier soir, soyez-en sûr ! Ils ont voulu m’assassiner, moi qui vous parle ! je dois savoir la chose mieux que vous ! Croyez-moi, monsieur le curé, faites arrêter ces bandits et leur animal. Si vous les laissez aller, il nous arrivera malheur à tous, c’est certain !

Sagababa trépignait en entendant la vieille parler de lui en ces termes ; s’il n’avait été maintenu par Polyphème, il se fût jeté de nouveau sur sa calomniatrice ; sa petite figure grimaçante de fureur ajoutait à la frayeur de la servante et la faisait crier de plus belle.