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poule dans le poulailler. Philéas, enchanté, courut vers la niche et fit triomphalement avaler l’œuf tout chaud au pauvre Canonet ; puis on fit cercle autour de lui, pour savoir si le remède avait réussi.

La joie de ses amis fut complète quand Canonet fila un son formidable, qui fit pâlir Rossignol et ses adversaires, groupés à l’autre bout de la place. Les applaudissements éclatèrent et Canonet, se rengorgeant, déclara que ses moyens étant au grand complet, la lutte pouvait commencer.

Pendant que Canonet avalait œuf sur œuf avec un courage admirable, Rossignol, inquiet des préparatifs de son adversaire, buvait force tisanes de toutes espèces. Son ami Larigot, nigaud de première force, hochait la tête en le voyant faire. Rossignol, ennuyé de ses gestes désapprobateurs, l’interpella brusquement.

Rossignol. — Ah ! ça, pourquoi que tu as l’air de me blâmer, toi ! N’est-ce pas prudent de m’éclaircir la voix comme mon rival ?

Larigot. — Oui, mais pas de cette manière-là. Je crois avoir entendu dire que le lait de poule est ce qu’il y a de mieux pour la poitrine. Ça vaudrait mieux que les drogues que tu ingurgites.

Rossignol, frappé. — Tiens, tu as raison ! Je me rappelle aussi qu’on me l’a dit. Mais où avoir cette boisson ?

Larigot. — Il faut demander à Philéas. Saindoux n’est pas du village de Canonet, ça doit lui être égal de te voir triompher de ce fifi-là !

Larigot alla donc aborder Philéas qui se pavanait,