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Pour le coup, Polyphème pensa étouffer.

— Ah ! ah ! ah ! mon très cher, s’écria-t-il en se tenant les côtes. Il y a en vous l’étoffe d’un ténor. Recommencez donc, je vous prie. Sagababa est dans l’admiration. Vous dépassez Absalon ; il ne chantait pas, lui, sur son arbre…

Philéas était exaspéré ! il donna une si vigoureuse secousse à la misérable ombrelle, cause de sa honte, que tout cassa avec un fracas horrible et Saindoux, se détachant de l’arbre comme un énorme fruit, roula sur l’herbe et arriva sur Sagababa avec la rapidité d’une trombe. Il saisit la tête laineuse du petit nègre au moment où celui-ci tenait une bouteille de sirop et la dégustait.

Sagababa, épouvanté, poussa des cris affreux ! le sirop inonda Saindoux, qui entraînait Sagababa à sa remorque ; ce fut une scène indescriptible… Enfin Philéas se releva, rouge, tremblant, furieux, gluant et plein de feuilles, le sirop dont il était couvert ayant collé sur ses vêtements force débris. Sagababa terrifié prit la fuite et courut tout d’une traite se réfugier dans le bois.

— Allons, mon cher ami, dit Polyphème reprenant son sérieux ; voilà encore une de ces aventures comme vous les aimez.

PHILÉAS, les dents serrées. — Pas celle-là, Tueur ! elle n’est pas à mon avantage…

POLYPHÈME, d’un air naïf. — Mais si !… la gymnastique audacieuse est toujours admirée, et vous venez d’en faire d’une façon remarquable, ne le niez pas !

PHILÉAS, s’adoucissant. — C’est un fait que je suis agile.