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voyages, en effet, mais il s’agit d’en finir avec ce Sagababa…

En disant cela, il posa brusquement l’aiglon dans les bras du petit nègre. L’animal, jeté ainsi sur Sagababa, cria de plus belle et se débattit. Au dégoût de Sagababa se joignirent la colère et l’humiliation. Il suivit « maître à moi » en secouant avec rage l’aiglon et en lui serrant le cou pour le faire taire. Cette manœuvre eut un trop beau résultat. L’oiseau cessa tout à coup de s’agiter et de crier. Sa tête retomba sur l’épaule de Sagababa, qui ne fut pas peu alarmé en voyant la conséquence de son emportement. Il se mit à dorloter son oiseau, mais sans succès. L’aiglon ne bougeait plus, ayant été bel et bien étouffé par la main déjà vigoureuse de sa « mère nourrice ».

Inquiet et désolé, Sagababa ralentit le pas, afin que Saindoux pût ignorer encore le trépas de son « fils adoptif ».

Le gros Philéas tournait de temps en temps la tête, tout en revenant à l’auberge avec Polyphème. Il vit avec satisfaction les soins minutieux que Sagababa prodiguait à l’aiglon. Une bonne expérimentée ne s’y fût pas mieux prise.

— Cela va-t-il bien ? lui cria-t-il ; avance donc ! tu marches comme une tortue.

— Le petit dort, répondit Sagababa avec onction. Moi aller doucement pour pas réveiller lui.

Cette réponse suffit à Philéas, qui ne s’inquiéta plus d’un « petit » si bien soigné, et Sagababa respira en le voyant entrer dans l’auberge sans faire attention à lui. Se glissant alors sans bruit dans la