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XIII



C’est fort chose qu’une nef se conduise,
Es fortunes de mer, a tout par elle,
Sanz maronnier ou patron qui la duise,
4Et le voile soit au vent qui ventelle ;
Se sauvement a bon port tourne celle,
En verité c’est chose aventureuse ;
7Car trop griefment est la mer perilleuse.

Et non obstant que parfois soleil luise,
Et que si droit s’en voit que ne chancelle,
Si qu’il semble que nul vent ne lui nuise,
11Ne nul decours, ne la lune nouvelle,[1]
Si est elle pourtant en grant barelle
De soubdain vent ou d’encontre encombreuse ;
14Car trop griefment est la mer perilleuse.

Si est pitié, quant fault que mort destruise
Nul bon patron, ou meneur de nacelle ;
Et est bien droit que le cuer dueille et cuise.
18Qui a tresor, marchandise ou vaisselle,
Ou seul vaissel qui par la mer brandelle :
N’est pas asseur, mais en voie doubteuse ;
21Car trop griefment est la mer perilleuse.

  1. A1 N n. secours