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LXXXIII



Trés faulz parjur, renoyé plein de vice,
Plus que Judas rempli de traïson.,
De tout mon cuer t’ay amé comme nyce
N’oncques vers toy ne pensay mesprison,
Et pour autre me laisses sanz raison.
Ne deusses pas ce moy faire a nul fueur ;
Car tu me metz en trop dure friçon.
Ha desloial ! comment as tu le cuer ?

Dieux, que feist on de telle gent justice ?
On en pent maint a trop moins d’achoison,
Se m’en vengier peüsse, je garisse
Des maulx que j’ay pour toy a grant foison.
Que fusses tu destroit en ma prison ?
Ton grant orgueil m’atasse, et la grandeur
Dont tu me fais vivre a tel cuisançon.
Ha desloial ! comment as tu le cuer ?

De mes bienfais me rens tel benefice,
Ne plus ne moins com fist le faulz Jason
A Medée, qui lui fist tel service
Qu’il en conquist la dorée toyson,
Pour lui laissa sa terre et sa maison,
Dont lui rendi après petit d’onneur ;
Encor me fais pis sanz comparoison.
Ha desloial ! comment as tu le cuer ?