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viens d’apprendre ici à connaître l’aloès (liñaloe), et je suis déterminé à en faire porter demain dix quintaux à mon navire, parce qu’on me dit qu’il est d’un grand prix[1]. Étant allés de même à la recherche de bonne eau, nous arrivâmes à une peuplade, située ici près,

  1. On ne doit jamais prendre à la lettre les dénominations d’histoire naturelle que l’on trouve dans les voyageurs qui ne sont pas naturalistes de profession, ni même dans les naturalistes antérieurs à l’époque où la science a obtenu une nomenclature fixe ; ce ne sont jamais que des à-peu-près, fondés même souvent sur des ressemblances assez éloignées.

    Ainsi, par le nom de baleine (journée du 21 septembre, page 24), Colomb peut très bien avoir voulu désigner un cachalot ou quelque autre grand cétacé. Lorsqu’il dit que les baleines sont ordinairement près des côtes, il n’a probablement entendu cela que des baleines et des autres cétacés qui venaient encore assez communément, à l’époque où il écrivait, dans le golfe de Biscaye.

    Il y a un grand nombre d’espèces d’aloès, et de plantes semblables à l’aloès. L’Amérique en possède que Colomb pourrait bien avoir prises pour de l’aloès de l’ancien continent ; mais puisqu’il en fait porter plusieurs quintaux dans son navire, il est probable qu’il a voulu parler du bois d’aloès. Or le bois d’aloès, autrement appelé agallochum, n’a rien de commun avec l’aloès ; c’est un arbre de la famille des euphorbes, dont le bois brûle avec une odeur agréable. Colomb aura pris quelque bois odoriférant pour du bois d’aloès. (C…r.)