ni corrigé dans la pièce. La cantatrice n’était autre que mademoiselle Olivier, de l’Opéra-Comique parisien. Etonnantes transformations de la vie d’artiste ! Pendant un an on porte le chapeau de bergère à la salle Favart, on gazouille des ariettes entre deux pavillons ornés de pots de fleurs et on épouse un jeune officier à la dernière scène. L’année suivante, on est à Rome, coiffée de feuilles de chêne ; on lève le poignard tragique sur les enfants blonds et le tamtam résonne dans la forêt d’Irminsul. Mademoiselle Olivier a fait des progrès extraordinaires en vocalisation ; elle manie fort habilement le trille et la cadence, aux dépens des muscles du visage qui paraissent fâchés de l’exercice violent de son gosier. Comme le public, débonnaire, l’applaudissait à outrance et que j’avais l’honneur d’être son compatriote, il ne m’appartenait pas de faire le difficile. Don Hasdrubal, à qui je demandais, un soir, ce qu’il lui semblait de la prima donna française, me répondit, en rabaissant les coins de sa bouche, par une contraction tout à fait carthaginoise :
— Eh ! ha una vocetta
En songeant aux larynx puissants et sonores de la Sicile, je fus obligé d’avouer que, pour lui, la voix de la signora méritait le nom de vocette.
Au bout d’un mois de séjour à Rome, j’avais pris les habitudes italiennes. Je dormais dans la journée ; on m’apportait du café à la glace. Je dînais, le soir, sous les arbres de Lepri. La nonchalance du pays commençait à me gagner. A Tivoli, j’avais eu besoin d’une journée entière pour considérer la grande cascade et le petit temple de Vesta. A Frascati, je consacrai six heures à un pin en forme de parasol