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Comme Adam, le voilà qui savoure la pomme,
Ce saint, que l’on croyait tout entier au bon Dieu,
Et fixe dans le bien comme un solide pieu ;
Qu’on entourait partout d’une estime profonde,
Qu’on venait écouter de tous les bouts du monde ;
Qu’on croyait pur enfin comme un lis au printemps
Que n’a point maculé le souffle des autans ;
Le voilà, comme Hercule, aux pieds d’une mégère
Qui, venant d’arriver d’une terre étrangère
Pour recueillir la fleur de nos riches moissons,
S’en ira le laissant cracher sur ses tisons.
N’eut-il pas bien mieux fait de prendre une servante,
D’un âge canonique, habile, intelligente ?
Il se fût comporté comme un homme d’esprit ;
Agissant autrement il perd tout son crédit.
Tous les brillants joyaux qui formaient sa couronne,
Vont tomber devant lui comme ces fruits d’automne
Que le vent déchaîné jette aux pieds des passants ;
Sa honte va jaillir sur tous ses partisans.
Puisqu’à de bons avis il ne veut pas se rendre,
Qu’il aille donc chercher quelqu’un pour le défendre !
Du reste, c’est bien fait qu’il soit ainsi dupé ;
Quand on fait à sa tête on doit être trompé ! »
Le hibou furieux d’entendre ce langage
Ne connut plus de frein, plus de borne à sa rage.
Il baissa son gros bec jusque sous son menton,
Comme pour l’aiguiser et se donner du ton,
Puis le dressa soudain, fier et plein de furie :
« Ah ! de me marier cela vous contrarie ?
Eh bien ! ma très-charmante, on le fera demain.
Trouvez-vous donc ici sur le bord du chemin,
Vous me verrez passer avec mon hirondelle ;
Et je vais essayer de la rendre si belle