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la grotte

gratitude touchante, car les sauvages ne sont jamais ingrats ».

— « Ah ! dit à son tour Paul, vous n’êtes donc pas tombée du ciel tout armée pour arracher deux malheureux des mains de leurs bourreaux ? »

— « Non. dit Fleur des Ondes, je ne viens pas du ciel ! Si vous demandiez à ceux de la nation, quelle est mon origine, ils vous répondraient que je suis la fille du Démon des Mers, et que mon père fut, il y a plus de vingt ans, apporté sur ces rivages par une vague monstre venue des profondeurs infernales. Tenez, si vous aimez les histoires merveilleuses, je vous conterai celle-là ».

— « Oui ! oui ! dirent les Français, contez, contez tout de suite ! »

— « Soyez indulgents, Messieurs, ce sera la première fois que je dirai cette aventure, et, depuis plusieurs lunes, je n’ai pas eu l’avantage de m’exprimer en français. Vous ne sauriez croire comme votre langage est doux à mon oreille ; souvent je chante, dans la forêt, les refrains que m’a appris mon père : l’écho redit ma chanson ; alors, il me semble que la voix du cher défunt répond à la mienne. Je sens son âme planer autour de moi, et j’éprouve moins désespérément le sentiment de mon abandon ».

L’émotion avait mis des larmes à la frange de ses cils, tandis qu’elle évoquait ces souvenirs : « Pardonnez-moi, reprit-elle, je vous ai promis une histoire… la voici :