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l’enlèvement

elle, d’un geste autoritaire ; et, s’avançant avec assurance jusqu’auprès des prisonniers, elle coupa leurs liens et leur dit en français : « Vous n’avez plus rien à craindre : suivez-moi ! »

Philippe et Paul croyaient rêver, mais ils obéirent. Donnant la main à ses protégés, l’inconnue traversa les rangs des Iroquois. Nul ne fit un geste pour la retenir ou lui enlever les jeunes gens. Tous trois s’engagèrent dans l’épaisseur de la forêt. De temps en temps, les deux Français se pressaient la main, pour se prouver qu’ils étaient bien éveillés. Leur protectrice les fit passer par des fourrés épais et des éclaircies où le soleil dorait le sable humide ; sa marche rapide sous le bois prouvait une grande habitude des lieux : elle allait, sans la moindre hésitation, à travers les multiples sentiers, suivant un chemin familier. Parfois elle écartait un rameau qui obstruait la voie ; le ployait d’une main exercée, en disant simplement sans se retourner : « Attention ! » puis se rangeait pour laisser passer les deux hommes. Quand les branches s’étaient refermées, elle reprenait les devants. Eux la suivaient, un peu gênés malgré la gravité des circonstances par l’autorité de cette femme qui, d’un geste, les avait arrachés à la mort, et les entraînait à sa suite sans même entendre leurs remerciements.

Enfin, après une heure de marche silencieuse, l’inconnue gravit un petit rocher au bord du