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Ces dernières années, il ressentait une grande fatigue des variations continuelles de la politique. Élever des arcs triomphaux ou arranger les ailes mécaniques des anges en bois l’ennuyait. Il lui semblait que l’heure du repos était venue.

Il prit la résolution de quitter Milan et de s’engager au service des Médicis.

Quelques jours avant son départ de Milan, la nuit même où furent brûlés cent trente sorciers et sorcières, les moines de l’abbaye de San Francesco trouvèrent dans la cellule de fra Benedetto l’élève de Léonard, Giovanni Beltraffio, étendu sur le sol sans connaissance. Évidemment, c’était un accès semblable à celui qui l’avait atteint quinze ans auparavant, lors de la mort de Savonarole. Mais cette fois Giovanni guérit vite ; seulement, parfois, dans ses yeux indifférents, sur son visage étrangement impassible, presque mort, se lisait une expression qui inspirait plus de crainte à Léonard que son ancienne maladie.

Conservant toujours l’espoir de le sauver en l’éloignant de sa personne, de son « mauvais œil », le maître lui conseillait de rester à Milan près de fra Benedetto, jusqu’à son complet rétablissement. Mais Giovanni le supplia de ne pas l’abandonner, de le prendre avec lui à Rome, avec une telle insistance, un tel désespoir doux que Léonard ne sut pas lui refuser.

Les troupes françaises approchaient de Milan. La populace se révoltait. Il n’y avait pas de temps à perdre.