alors il lui semblait que monna Cassandra se vantait, qu’en réalité elle ne savait rien. La peur s’emparait de lui, il voulait fuir. Mais il était trop tard. La curiosité l’entraînait vers elle, et il sentait qu’il ne s’en irait pas avant d’avoir tout appris, qu’elle le sauverait ou qu’il se damnerait avec elle. À ce moment arriva à Milan le célèbre docteur en théologie, l’inquisiteur fra Giorgio da Cazale. Le pape Jules II, inquiet des rapports qui lui parvenaient sur l’extraordinaire propagation de la sorcellerie dans la province lombarde, l’y envoyait nanti de pleins pouvoirs. Les nonnes du couvent Maggiore et ses protecteurs au palais épiscopal avertirent monna Cassandra du danger qu’elle courait. Ils savaient bien qu’une fois entre les mains de l’inquisiteur aucune protection ne la sauverait, et ils décidèrent de la cacher en France, en Angleterre ou en Hollande.
Un matin, deux jours avant le départ de Cassandra, Giovanni causait avec elle dans la salle retirée du Palazzo Carmagnola.
Le soleil pénétrant dans la pièce, à travers les branches noires veloutées des cyprès, semblait pâle comme un clair de lune ; le visage de la jeune fille était particulièrement beau et impénétrable. À cet instant de la séparation, Giovanni sentit seulement combien elle lui était chère. Il lui demanda :
— Nous reverrons-nous encore ? Me révélerez-vous le suprême mystère dont vous m’avez parlé ?
Cassandra le regarda, muette, puis prit dans une cassette une pierre carrée d’un vert transparent. C’était