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le granit noir, les pierres sculptées des gnostiques portant l’inscription « Abraxas », des parchemins byzantins durs comme de l’ivoire, des tuiles d’argile couvertes d’inscriptions assyriennes, des livres de mages persans, reliés de fer, et des papyrus de Memphis, transparents et tendres comme des pétales de fleur. Elle racontait à Giovanni ses voyages, les merveilles qu’elle avait vues, la solennité des temples de marbre blanc abandonnés des fidèles et érigés sur des rocs noirs rongés par la mer sous des cieux éternellement bleus ; elle lui disait toutes les peines qu’elle avait endurées et les dangers qu’elle avait courus. Et, lorsqu’une fois il lui demanda ce qu’elle avait cherché dans ces voyages, pourquoi elle avait, endurant tant de tourments, amassé toutes ces antiquités, elle répondit par les mots de son père, Lugi Sacrobosco :

« Pour ressusciter les morts. »

Et dans ses yeux s’alluma une flamme qui rappela à Giovanni l’ancienne sorcière Cassandra.

Elle avait peu changé. Son visage était toujours étranger à la joie et à la douleur, impassible, comme celui des antiques statues. Et plus inéluctablement que dix ans auparavant, le charme de la jeune fille attachait à elle Giovanni, éveillant en lui la curiosité, la peur et la pitié.

Durant son voyage en Grèce, Cassandra avait visité le village natal de sa mère, Mistra, perdu près des ruines de Lacédémone, parmi les collines brûlées du Péloponnèse, et où, depuis un demi-siècle à peine, s’était éteint le dernier maître de la sagesse hellénique, Hémistos