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dehors du mariage – lui paraissant grossière. Et il s’en éloignait comme du combat sanglant, sans s’indigner, sans blâmer, sans justifier, reconnaissant la loi naturelle de la lutte pour l’amour et pour la faim, mais ne voulant pas y prendre part, se soumettant à une autre loi d’amour et de pudeur.

Mais, même s’il l’aimait, aurait-il pu désirer une plus parfaite union avec son amante que dans ces profondes et mystérieuses caresses – dans la contemplation de cette vision immortelle, de cet être nouveau, conçu et né d’eux, comme l’enfant du père et de la mère, et qui était lui et elle en même temps ?

Et cependant il sentait que même dans cette union pure se cachait un danger, plus grand peut-être que dans l’ordinaire union d’amour charnel. Tous deux marchaient sur le bord d’un abîme, là où personne encore n’avait marqué ses pas, vainquant la tentation et l’attirance de l’infini. Entre eux existaient des mots glissants et transparents, à travers lesquels luisait le secret comme le soleil brille à travers le brouillard. Et par instants il songeait :

« Si lui ou elle transgressait la limite et transformait la contemplation en vie réelle ? Ne se révolterait-elle pas, ne le repousserait-elle pas avec haine et mépris comme le ferait toute autre femme ? »

Et il lui semblait qu’il imposait à la Gioconda un tourment terrible et lent. Et il s’effrayait de sa soumission, illimitée, comme de sa tendre et implacable curiosité, à lui. Seulement les derniers temps il sentit