qu’il sera. Moi, je sais que même maintenant, non seulement il m’égale, mais il est plus fort que moi ; oui, oui, je le sens : plus fort que moi !
Elle fixa sur lui ce regard dans lequel, il semblait à Giovanni, se reflétait le regard même de Léonard et sourit d’une façon étrange et douce.
Un jour, dans la chapelle Brancacci, dépendante de la vieille église Santa Maria del Carmine. Léonard rencontra un jeune homme, presque un enfant, qui copiait les célèbres fresques de Tomaso Masaccio. Il portait une casaque noire tachée de couleurs, du linge propre mais de toile grossière évidemment confectionnée au village. Il était élancé, souple : son cou mince était blanc et tendre comme celui des jeunes filles anémiées ; son visage, ovale comme un œuf et pâle jusqu’à la transparence, avait un charme minaudier, avec de grands yeux noirs pareils à ceux des paysannes de l’Ombrie qui avaient servi de modèles aux madones du Pérugin, des yeux vides de pensée, profonds et limpides comme le ciel.
Peu de temps après, Léonard de nouveau rencontra l’adolescent au couvent de Santa Maria Novella, dans la salle du Pape, où était exposé le carton de la bataille d’Anghiari. Le jeune homme étudiait et copiait ce carton avec autant de zèle que les fresques de Masaccio. Probablement connaissait-il déjà Léonard, car il le buvait du regard, visiblement désireux de lui adresser la parole et apeuré de le faire.
Le maître s’approcha de lui en souriant. Se hâtant, ému et rougissant avec une enfantine insinuation, le jeune