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Celui qui ne ressemble pas à tout le monde est seul contre tous, car le monde est créé pour la médiocrité et il n’y a de place au monde que pour elle. Oui, mon ami, il est même triste de vivre, et peut-être le pire dans une existence n’est-ce pas le souci, la maladie, la pauvreté, la douleur, mais l’ennui.

Silencieux, ils descendirent au pied du Capitole, près des ruines du temple de Saturne où jadis s’élevait le Forum.

Des deux côtés de l’antique Voie sacrée, depuis l’arc de Septime Sévère jusqu’à l’amphithéâtre des Flavius, s’alignaient de pauvres masures en ruines. On assurait que beaucoup d’entre elles étaient bâties avec des débris de précieuses sculptures reproduisant les dieux olympiens. Timidement, des églises chrétiennes s’abritaient dans ces temples païens. Les amas d’ordures, de poussière et de fumier avaient surélevé le terrain de dix coudées. Mais malgré tout, de place en place se dressaient de vieilles colonnes couronnées d’architraves menaçant de s’abattre. Nicolas désigna à son ami l’emplacement du Sénat romain, la Curie, maintenant dénommé le « Champ des Vaches ». Là se tenait le marché aux bestiaux. Les colonnes de marbre, les bas-reliefs tombés, recouverts de fiente, se noyaient dans une boue noirâtre. Près de l’arc de Titus Vespasien s’adossait une vieille tour qui, à un moment donné, servait de repaire aux écumeurs de grande route, les barons Frangipani. Vis-à-vis se trouvait une auberge borgne pour les paysans du marché aux bestiaux. Par