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suffisamment enrichi et se déclarait son héritier. On disait qu’il les engraissait comme des porcs destinés à l’abattoir. L’Allemand Johann Burghardt, le maître de cérémonies, marquait constamment sur son cahier de notes, parmi les descriptions des services pompeux, la mort subite de l’un ou de l’autre prélat avec un laconisme imperturbable :

« Il a bu la coupe. Biberat calicem. »

— Est-il vrai, monsignori, demanda le chambellan Pedro Caranja, est-il vrai que le cardinal Monreale soit malade depuis cette nuit ?

— Vraiment ? s’écria Arborea terrifié. Qu’a-t-il ?

— On ne sait exactement. Des vomissements…

— Oh ! Seigneur, Seigneur ! soupira Arborea en comptant sur les doigts : Orsini, Ferrari, Michiele, Monreale…

— L’atmosphère ou les eaux du Tibre sont peut-être néfastes aux santés de Vos Excellences ? insinua malignement Beltrando.

— L’un après l’autre ! l’un après l’autre ! murmurait Arborea en pâlissant. Aujourd’hui vivant, et demain…

Un silence plana.

Une foule de seigneurs, de chevaliers, de gardes du corps sous le commandement du neveu du pape, Rodrigues Borgia, des membres de la Curie, des chambellans, envahit la salle.

Un murmure respectueux s’éleva :

— Le Saint-Père ! Le Saint-Père !

La foule s’agita, s’écarta, les portes s’ouvrirent et le pape Alexandre VI Borgia entra.