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ainsi. » Et le pape ajouta : « Car je vous donne l’exemple afin que vous voliez les vivants et les morts, comme je les ai volés moi-même. »

Tous éclatèrent de rire. Le maître organiste, Otto Marpurg, petit vieillard au sourire enfantin, qui n’avait pas prononcé une parole jusqu’alors, sortit de sa poche des feuillets soigneusement pliés et proposa de lire une satire sur Alexandre VI, qui circulait mystérieusement sous forme de lettre à Paolo Savelli, seigneur exilé de la cour de Rome. En une longue énumération, l’auteur racontait toutes les scélératesses et toutes les abominations qui s’accomplissaient dans la demeure du pape, commençant par la simonie et achevant par le fratricide de César et l’inceste du pape avec Lucrèce, sa fille. La lettre se terminait par un appel à tous les rois et gouvernants d’Europe, leur conseillant de s’unir pour anéantir « ces monstres, ces fauves à forme humaine ». « L’Antéchrist est venu, car, en vérité, jamais la Foi et l’Église de Dieu n’ont eu d’ennemis tels que le pape Alexandre VI et son fils César. »

Une discussion s’éleva pour déterminer si le pape était réellement l’Antéchrist. Les opinions étaient différentes. L’organiste Otto Marpurg avoua que depuis longtemps ces idées lui enlevaient tout repos et qu’il supposait que le véritable Antéchrist n’était pas le pape lui-même, mais son fils César qui, à la mort du père, s’emparerait du trône de saint Pierre. Fra Martino prouvait, en s’appuyant sur un passage du livre L’Ascension d’Ezéchiel, que l’Antéchrist, ayant l’image