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— Expliquez-moi, je ne parviens pas à comprendre, demandait un jeune ouvrier au visage bonasse. On m’a dit que, de tous les seigneurs, il préférait et protégeait le lieutenant.

— C’est pour cela qu’il l’a châtié, répondit un marchand respectable, vêtu d’une pelisse en poil d’écureuil. Don Ramiro trompait le duc. En son nom, il opprimait le peuple, enfermait les gens dans les prisons et les soumettait à la torture. Et devant le duc, il jouait à l’agneau. Il croyait ainsi donner le change. Mais son heure est venue, la patience du seigneur était outrepassée, et il n’a pas hésité, pour le bien du peuple, sans jugement, sans tribunal, à trancher le cou à son premier lieutenant comme à un vulgaire bandit afin de donner un exemple aux autres. Maintenant, tous ceux qui ont le museau sale se tiennent tranquilles, car ils voient combien terrible est sa colère et juste son jugement. Il favorise les humbles et rabaisse les orgueilleux.

Regas eos in virga ferrea, murmura un moine. Tu les conduiras avec un sceptre de fer.

— Oui, oui ! tous ces fils de chiens, martyriseurs du peuple !

— Il sait punir – il sait gracier.

— On ne peut avoir de meilleur roi !

— En vérité, affirma un paysan. Le bon Dieu a eu pitié enfin de la Romagne. Avant, on nous écorchait vifs, on nous tuait d’impôts. On n’avait déjà pas de quoi manger et pour le moindre retard de la dîme on emmenait le dernier bœuf ! On ne respire que depuis le