Page:De Merejkowsky - Le Roman de Léonard de Vinci, 1907.djvu/532

Cette page n’a pas encore été corrigée

— On devrait confier les affaires d’État à des célibataires. Car il faut choisir : ou sa femme ou la politique.

Et s’éloignant un peu, d’une voix rêche et criarde il continua :

— Avez-vous l’intention de vous marier, jeune homme ?

— Pas pour le moment, messer Nicolo, répondit Luccio.

— Jamais, entendez-vous, jamais ne faites cette sottise. Que Dieu vous en préserve. Se marier, messer, équivaut à chercher dans un sac une anguille parmi des vipères ! La vie conjugale est un fardeau possible pour les épaules d’Atlas et non pour celles des hommes. N’est-ce pas, messer Leonardo ?

Léonard le regardait et devinait que Machiavel aimait monna Marietta de profonde tendresse, mais, honteux de cet amour, le cachait sous un masque d’impudence.

Léonard se leva pour partir. Il invita Machiavel à faire route ensemble. Mais celui-ci tristement secoua la tête, répondant qu’il lui fallait attendre l’argent de Florence pour payer l’aubergiste et louer des chevaux. De sa désinvolture il ne restait plus rien. Il semblait affaissé, malheureux et malade.

L’ennui de l’immobilité, du trop long séjour à la même place était mortel pour lui. Ce n’était pas en vain que les membres du Conseil des Dix lui reprochaient ses trop fréquents et inattendus changements qui embrouillaient les affaires. Léonard le