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séparés par des tentures. Sous les arcades ogivales, l’obscurité et le mystère régnaient comme dans un bois. Et, en bas, quelques rayons de soleil s’égrenant dans les sombres vitraux, tombaient en une nappe multicolore sur les flots mouvants de la foule, sur la pierre grise des piliers. Au-dessus de l’autel rougissaient les feux des trépieds.

La messe était dite. La foule attendait le prédicateur. Tous les regards étaient fixés sur la chaire en bois sculpté, érigée au centre même de l’édifice, appuyée contre une colonne. Giovanni, au milieu de la foule, écoutait les propos tenus à voix basse par ses voisins :

— Sera-ce bientôt ? demandait un petit homme écrasé par la foule, le visage pâle, tout en sueur, les cheveux collés au front et retenus par une mince lanière, menuisier de son état.

— Dieu seul le sait, répondit un chaudronnier, géant à larges épaules et à visage apoplectique. Il y a, à San Marco, un moinillon nommé Maruffi, une espèce de fanatique bègue : quand Maruffi lui dit qu’il est temps, il vient. Dernièrement, nous avons attendu quatre heures, nous croyions que le sermon n’aurait pas lieu et tout à coup…

— Ah ! Seigneur, Seigneur ! soupira le menuisier. J’attends depuis minuit. Je suis à jeun, la tête me tourne. Je n’ai même pas mâché une racine de pavot. Si je pouvais, au moins, m’accroupir sur les talons !…

— Je te disais, Damiano, qu’il fallait venir à