Page:De Merejkowsky - Le Roman de Léonard de Vinci, 1907.djvu/520

Cette page n’a pas encore été corrigée

dans la rue, lui montra une figue : « Je ne te donnerai pas une des miennes pour cent des tiennes. » Mais j’ai entendu dire que le duc de Valentino vous considère comme un connaisseur profond de la science militaire, et voilà de quoi j’aimerais causer avec Votre Excellence. Ce sujet m’a toujours paru d’autant plus sérieux et digne d’attention que la grandeur militaire est toujours basée sur la force militaire, la quantité et la qualité de son armée régulière, comme je le prouverai à Votre Excellence dans mon livre sur les monarchies et les républiques, où les lois naturelles et dirigeantes de la vie, de la croissance, de la chute et de la mort d’un empire seront déterminées avec une exactitude de mathématicien. Car je dois vous dire, jusqu’à présent, tous ceux qui ont écrit sur ce sujet…

Il s’interrompit avec un bon sourire :

— Excusez-moi, messer. Je crois que j’abuse de votre complaisance : vous vous intéressez peut-être aussi peu à la politique que moi à la peinture.

— Non, non, répliqua l’artiste, ou plutôt, je serai aussi sincère que vous, messer Nicolo. En effet, je n’aime pas les discussions habituelles des gens sur la guerre et les affaires d’État parce qu’elles sont menteuses et vides. Mais vos opinions sont si différentes de celles de la généralité, si nouvelles et peu ordinaires, que je vous écoute, croyez-moi, avec grand plaisir.

— Prenez garde, messer Leonardo, dit Nicolo, vous pourriez vous en repentir ; vous ne me connaissez pas encore ; c’est mon grand cheval de bataille : si je l’enfourche,