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dehors. Léonard dut attendre un jour encore. Ne sachant à quoi s’occuper, il se mit à installer dans l’âtre une broche de son invention, qui tournait automatiquement sous l’influence de l’air surchauffé.

— Avec ce système, expliquait Léonard, le cuisinier n’a pas à craindre que son rôti soit brûlé, puisque le degré de chaleur reste égal ; lorsque celle-ci augmente, la broche tourne plus vite ; lorsqu’elle diminue, la broche tourne plus lentement.

L’artiste installait cette broche perfectionnée, avec le même amour que sa machine volante.

Dans la même pièce, messer Nicolo expliquait à de jeunes sergents d’artillerie, joueurs effrénés, une martingale trouvée par lui, qui permettait de gagner à coup sûr aux osselets, car elle corrigeait les caprices de la « courtisane fortune ». Très sagement et éloquemment, il expliquait cette règle, mais chaque fois qu’il essayait de la mettre en pratique, il perdait régulièrement, à son très grand étonnement et à la grande joie des auditeurs. Il se consolait pourtant en disant qu’il avait dû commettre une erreur dans une règle certaine. La partie se termina par une explication inattendue et désagréable pour messer Nicolo : il n’avait pas un sol vaillant et jouait à crédit.

Dans la soirée arriva, accompagnée d’une quantité incalculable de ballots et de caisses et d’un nombreux personnel de pages, palefreniers, bouffons et animaux divertissants, la célèbre courtisane vénitienne, « la merveilleuse pécheresse », Lena Griffa, celle-là même qui jadis à Florence avait failli devenir la victime de l’« armée sainte »