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« LEONARD DE VINCI »

Lorsque au-dessus de la verte plaine lombarde il aperçut les cimes neigeuses des Alpes, il sentit que pour lui commençait une vie nouvelle et que cette terre étrangère serait pour lui la patrie.


IX

C’est ainsi qu’en gravissant le mont Albano, Léonard se remémorait son existence.

Il atteignait presque la cime de la montagne Blanche. Maintenant le sentier grimpait droit, sans zigzags, entre les broussailles sèches et les chênes maigres qui portaient encore les feuilles de l’année précédente. Les montagnes, d’un violet trouble sous l’action du vent, semblaient sauvages, terribles et désertes, presque appartenant à une autre planète. Le vent le fouettait au visage, le piquait d’aiguillons glacés, aveuglait ses yeux. Par moments, une pierre se détachait et roulait avec un bruit sourd au fond du précipice.

Léonard montait toujours plus haut et plus haut, et il en éprouvait une extrême jouissance, comme s’il conquérait les sévères montagnes ; et, à chaque pas, le regard devenait plus pénétrant, l’horizon se découvrait toujours plus large. Et partout – l’étendue, le vide, comme si l’étroit sentier eût fui sous les pieds ; et lentement, avec une insensible égalité, il volait au-dessus