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sur la rive gauche de la rivière Adda. Là, le cours rapide de l’Adda est retenu par des cataractes. Entre ses rives escarpées, l’Adda précipite ses ondes froides, vertes, tumultueuses, indomptables ; et à côté d’elle le canal calme, lisse comme un miroir, glisse entre des berges égales. Cette opposition paraissait à l’artiste pleine de sens prophétique. Il comparait et ne pouvait décider ce qui était plus beau de la création du cerveau humain et de la volonté humaine, sa propre création, le canal, ou bien de sa sœur sauvage, l’Adda furieuse ? Son cœur comprenait également ces deux courants. Du haut de la dernière terrasse du jardin on découvrait la verte vallée de la Lombardie, Bergame, Treviglio, Crémone et Brescia. En été, le parfum des foins embaumait ces prés à perte de vue. Le seigle et le blé, unis par les vignes, cachaient jusqu’à leurs cimes les arbres fruitiers ; les épis baisaient les poires, les pommes, les cerises, et toute la vallée semblait un énorme jardin.

Au nord se détachaient les noires montagnes de Côme ; au-dessus s’élevaient en demi-cercle les premiers contreforts des Alpes, et encore plus haut, dans les nuages, scintillaient les cimes neigeuses, roses et dorées.

En même temps que lui se trouvaient à la villa fra Luca Paccioli et l’alchimiste Sacrobosco, dont la maison avait été détruite par les Français. Léonard les fréquentait peu, préférant la solitude. Mais il devint vite l’ami du jeune fils du maître de la maison, Francesco.