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doute : la plus belle œuvre de Vinci était condamnée à périr.

Avant de quitter le réfectoire, Léonard regarda une dernière fois le Christ et, comme s’il venait de le voir seulement, il comprit combien cette œuvre lui était chère.

Avec la perte du Colosse et de la Sainte Cène, les derniers liens qui l’attachaient aux humains se trouvaient rompus. Sa solitude devenait maintenant de plus en plus désespérée.

La poussière du Colosse avait été dissipée par le vent ; sur le mur où se trouvait le Christ, la moisissure couvrirait les couleurs écaillées, et tout ce qui était sa vie disparaîtrait comme une ombre.

Il revint à la maison, descendit dans les caves et, passant dans la chambre d’Astro, s’y arrêta un instant. Beltraffio mettait au malade des compresses d’eau froide.

— Encore la fièvre ? demanda le maître.

— Oui, il délire.

Léonard se pencha pour examiner le pansement et écouter les paroles hachées du blessé.

— Plus haut, plus haut. Directement vers le soleil. Pourvu que les ailes ne prennent pas feu ! Petit, d’où viens-tu ? Quel est ton nom ? La Mécanique ? Je n’ai jamais entendu dire que le diable se soit nommé Mécanique. Pourquoi grinces-tu des dents ? Allons, laisse-moi. Il m’entraîne, il m’entraîne… Je ne peux pas… Attends… laisse-moi respirer…

Le visage du malade exprimait la tristesse. Un cri