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foule sans trouver l’occasion d’attirer sur lui l’attention du roi, le saisit par la main et, courbé jusqu’à la contorsion, avec un long sifflement énumérant les qualités – stupendissimo, prestantissimo, invincibilissimo – présenta l’artiste au roi.

Louis XII parla de la Sainte Cène. Il loua l’interprétation des apôtres, mais s’extasia surtout sur la perspective du plafond. Fra Luca s’attendait à chaque instant que Sa Majesté prierait Léonard d’entrer à son service ; mais un page entra et remit au roi une lettre de France. Louis XII reconnut l’écriture de sa femme, sa bien-aimée Bretonne, Anne. Elle lui annonçait son heureuse délivrance. Les seigneurs s’avancèrent, présentèrent leurs hommages et leurs compliments, éloignant du trône Léonard et Paccioli. Le roi les regarda, voulut leur dire quelque chose, puis les oublia aussitôt : il invita aimablement les dames à vider une coupe à la santé de l’accouchée et passa dans une autre salle.

Paccioli voulut entraîner son ami.

— Vite ! vite !

— Non, fra Luca, répondit tranquillement Léonard. Je vous remercie de vos peines. Mais je ne me rappellerai pas au souvenir du roi. En ce moment Sa Majesté pense à tout autre chose.

Il quitta le palais.

Sur le pont-levis Battiponte, il fut rejoint par le secrétaire de César Borgia, messer Agapito, qui lui proposa, au nom du duc, la place d’ingénieur ducal, le même poste que Léonard occupait à la cour de Ludovic le More.