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Le forgeron ouvrit.

— Qu’avez-vous, fra Luca ? demanda l’artiste, en voyant le visage effrayé du moine.

— Moi, je n’ai rien, messer Leonardo… C’est-à-dire si, mais nous en recauserons plus tard… Maintenant… Oh ! messer Leonardo ! votre Colosse… les arbalétriers gascons… j’arrive du palais, j’ai vu, de mes yeux vu… les Français détruisent votre œuvre… Courons vite…

— Pourquoi ? répondit calmement Léonard, bien que son visage pâlit. Qu’y ferons-nous ?

— Comment ? Mais… vous ne resterez pas ainsi, les bras croisés, à contempler la destruction d’un de vos chefs-d’œuvre ? J’ai un sauf-conduit pour le sire de La Trémoille. Il faut faire des démarches…

— Nous n’arriverons pas à temps ! murmura l’artiste.

— Si ! si ! nous couperons par les potagers, à travers les haies, seulement partons plus vite !

Entraîné par le moine, Léonard sortit de la maison, et ils se dirigèrent en courant vers le palais.

En route, fra Lucas conta ses mésaventures et ses peines : la veille, les lansquenets s’étaient introduits dans ses caves, s’étaient enivrés, et ayant trouvé les reproductions en cristal des corps géométriques, les avaient pris pour des appareils de magie noire et les avaient brisés.

— Que leur avaient fait mes pauvres cristaux, je vous le demande ? disait en pleurant presque Paccioli.

Ils arrivèrent sur la place du Palais, et aperçurent près de la porte principale, sur le pont-levis de Battiponte,