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Giovanni leva sur lui de grands yeux étonnés et, subitement, en un élan irrésistible, se serra contre lui, cacha son visage sur sa poitrine, dans la longue barbe douce comme de la soie.

— Si jamais, balbutiait-il entre les sanglots qui le secouaient, si jamais je vous quitte, maître, ne croyez pas que ce soit parce que je ne vous aime pas ! Je ne sais pas moi-même ce que j’ai… J’ai des idées folles… Dieu m’a abandonné. Oh ! seulement ne pensez pas : non ! Je vous aime plus que tout au monde, plus que mon père fra Benedetto. Personne ne peut vous aimer autant que moi…

Léonard, avec un doux sourire, caressait ses cheveux et le consolait comme un enfant :

— Allons, tais-toi, tais-toi ! Je sais que tu m’aimes, mon petit, pauvre, sensible, naïf… C’est Cesare qui a dû encore te conter quelques sottises. Pourquoi l’écoutes-tu ? Il est intelligent et malheureux aussi : il m’aime, et il croit qu’il me déteste. Mais il y a bien des choses qu’il ne comprend pas…

Giovanni se tut, cessa de pleurer, fixa sur le maître un regard scrutateur et dit :

— Non, ce n’est pas Cesare. Moi seul… et pas moi… Mais lui

— Qui, lui ? demanda Léonard.

Giovanni s’accrocha au maître. Ses yeux de nouveau s’emplirent d’effroi.

— Il ne faut pas, dit-il tout bas, je vous prie… il ne faut pas parler de lui

Léonard le sentit trembler dans ses bras.