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commençait un dessin et de suite l’abandonnait. Dans son cœur s’agitait une inquiétude vague, comme s’il devait résoudre quelque chose et ne le pouvait pas. Sa pensée revenait toujours au même point.

Il songeait à la fuite de Giovanni chez Savonarole, puis à son retour chez lui Leonardo, à sa période de calme durant laquelle il le croyait guéri, entièrement pris par l’art. Mais le « duel du feu » et la nouvelle de la mort de fra Girolamo l’avaient rendu encore plus piteux, plus égaré.

Léonard voyait ses souffrances, voyait qu’il voulait et ne pouvait le quitter à nouveau ; devinait la lutte qui s’opérait dans le cœur de son élève, trop profond pour ne pas sentir, trop faible pour vaincre les contradictions. Parfois, il semblait au maître qu’il devait chasser Giovanni pour le sauver. Mais il n’en avait pas le courage.

— Si je savais comment le soulager, pensait Léonard.

Il eut un sourire amer :

— Je lui ai jeté un sort ! Les gens ont probablement raison quand ils disent que j’ai le mauvais œil…

Montant les marches raides d’un escalier sombre, il frappa à une porte, et ne recevant pas de réponse, l’ouvrit.

L’obscurité régnait dans la cellule. On entendait la pluie crépiter sur le toit et le vent hurler. Une lampe brûlait faiblement devant une image de la Madone. Un grand crucifix noir pendait sur le mur blanc. Beltraffio était couché tout habillé sur son lit, contourné