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— Comment ? Vous ne le savez pas ? Vous n’avez pas appris que, d’après les observations de Colomb sur l’étoile polaire au méridien des îles Açores, il avait prouvé que la Terre n’était pas ronde comme on l’avait supposé, mais qu’elle avait l’aspect d’une poire surmontée d’une excroissance, tel un sein de femme ? Justement sur cette excroissance se trouve une montagne dont la cime s’appuie dans la sphère lunaire, et là est le Paradis…

— Mais, Guido, cela contredit toutes les déductions de la science.

— La science ! dit Guido en haussant avec mépris les épaules. Savez-vous, messer, ce que Colomb dit de la science ? Je vous citerais les paroles de son « Livre prophétique », Libro de las Profecias : « Ni la mathématique, ni les cartes géographiques, ni des déductions de la raison ne m’ont aidé à faire ce que j’ai fait, mais simplement la prophétie d’Isaïe sur la nouvelle terre. »

Guido se tut. Il sentait que ses habituelles douleurs articulaires le reprenaient. Léonard appela les domestiques, qui emportèrent le malade dans sa chambre.

Resté seul, l’artiste se mit à vérifier les calculs de Colomb concernant la marche de l’étoile polaire, et y trouva de si grossières erreurs qu’il n’en voulut croire ses yeux.

« Quelle ignorance ! pensa-t-il tout étonné. On pourrait supposer qu’il a découvert le Nouveau Monde par hasard, comme on bute sur un objet dans les ténèbres, et que, ainsi qu’un aveugle, il ne sait ce qu’il a