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prouvé un tel dévouement et des sentiments si élevés que, souvent, communiant avec elle, nous obtenions une infinie béatitude et l’oubli de toutes nos préoccupations. »

Cecilia applaudit joyeusement et embrassa son amie, les yeux pleins de larmes maternelles :

— Tu vois, petite sœur, je te disais qu’il avait un cœur d’or ! Maintenant, mon petit-fils Paolo est le plus riche héritier de Milan !

— Quelle date aujourd’hui ? demanda le More.

— Le 28 décembre, monseigneur, répondit Cecilia.

— Le 28 ! répéta-t-il pensif.

Juste à cette date, un an auparavant, la défunte duchesse était venue à l’improviste au palais Crivelli et avait failli trouver son mari auprès de sa maîtresse.

Il examina la pièce. Rien n’y était changé : tout était clair et douillet ; le vent de même hurlait dans l’âtre, le feu de même flambait dans la cheminée, et au-dessus dansaient les Amours nus qui jouaient avec les instruments du saint supplice. Et sur la table ronde, couverte de velours vert, étaient posés une coupe d’eau Balnea Aponitana, des rouleaux de musique et une mandoline. La porte était ouverte dans la chambre, et plus loin, dans la salle d’atours, se profilait l’armoire dans laquelle le duc s’était caché.

Que n’aurait-il pas donné pour se retrouver à ce même instant, entendre frapper à la porte d’entrée, voir arriver la servante affolée, criant : « Madonna Béatrice ! », rester, ne fût-ce qu’une seconde, comme un voleur, dans cette armoire, en écoutant la voix