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duc légitime Jean Galéas !… Mais, Tu es miséricordieuse. Protectrice unique, entends ma prière et pardonne-moi ! Je donnerai tout, je me repentirai de tout, prends mon âme… mais sauve-la !

Des bribes de pensées stupides se pressaient dans son cerveau et l’empêchaient de prier. Il se souvint d’un récit qui l’avait fait rire récemment. Un marinier se sentant perdu dans un coup de tempête, promit à la Vierge Marie un cierge haut comme le mât du navire, et lorsque son camarade lui demanda où il prendrait la cire nécessaire pour ce cierge phénoménal : « Tais-toi, lui avait-il répondu, pourvu que nous nous sauvions maintenant, nous aurons le temps d’y songer plus tard. Du reste, j’espère que la Madone se contentera d’un cierge plus petit. »

— À quoi vais-je penser ! se dit le duc. Deviendrais-je fou ?

Il fit un effort pour se ressaisir et de nouveau pria.

Mais les brillantes sphères de cristal, les soleils transparents, tournèrent devant ses yeux au son d’une musique douce et du refrain obsédant de l’enfant doré :


Je reviendrai parmi vous,
Sur l’ordre du duc le More.


Puis tout s’effaça. Lorsqu’il s’éveilla, il lui sembla qu’il n’avait dormi que deux ou trois minutes. Mais, lorsqu’il sortit de la chapelle, il vit, à travers les fenêtres ternies par la neige, le jour gris d’un matin d’hiver.