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les dames, avec un sourire charmeur, promenaient leurs cavaliers par une chaîne d’or, comme des prisonniers, et lorsqu’ils tombaient devant elles, en soupirant langoureusement, elles leur posaient le pied sur la tête, telles des conquérantes.

Un chambellan accourut, fit de grands gestes et cria aux musiciens :

— Taisez-vous, taisez-vous ! La duchesse est malade.

Tout le monde se retourna. La musique se tut. Seule une viole, sur laquelle jouait un sourd, longtemps égrena encore ses notes grêles.

Des laquais passèrent vivement, portant un lit étroit, long, muni d’un matelas dur, composé de deux planches transversales pour la tête, de deux poignées pour les mains, et d’une traverse pour les pieds. Ce lit était conservé de temps immémorial dans les garde-robes du palais et avait servi pour les couches de toutes les duchesses de la maison Sforza. Étrange et menaçant paraissait ce grabat, transporté ainsi sous le feu des lumières du bal, au-dessus des têtes de toutes ces femmes en pompeux atours.

Tout le monde comprit.

— Si c’est une peur ou une chute, observa une vieille dame, il faudrait immédiatement lui faire avaler un blanc d’œuf cru, mêlé à de la soie pourpre effilochée.

Une autre assurait que la soie pourpre n’avait aucune action, l’important était d’avaler sept germes d’œuf de poule délayés dans un jaune.

Cependant, Ricciardetto, entrant dans une des salles