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Il s’anima, courut à la cheminée, et généreusement y précipita les derniers éclats de la bûche.

La dame enleva son masque.

— C’est moi, Bernardo.

Il poussa un cri, recula, et, pour ne pas tomber, dut se retenir au loquet de la porte.

— Jésus ! Sainte Vierge ! balbutia-t-il, les yeux écarquillés. Votre Altesse… Duchesse sérénissime…

— Bernardo, tu peux me rendre un grand service, dit Béatrice.

Puis, après avoir examiné la pièce, elle demanda :

— Personne ne peut entendre ?

— Soyez rassurée, Altesse, personne, sauf les rats et les souris.

— Écoute, continua lentement la duchesse, en fixant sur lui un regard scrutateur, je sais que tu as écrit pour madonna Lucrezia des vers d’amour. Tu dois avoir du duc des lettres de commande.

Il pâlit, et silencieux la regarda, ahuri.

— Ne crains rien, ajouta-t-elle, personne ne le saura, je t’en donne ma parole. Je saurai te récompenser, si tu exécutes ma prière. Je te ferai riche, Bernardo…

— Votre Altesse, dit-il avec effort, ne croyez pas… c’est une calomnie… pas une lettre… je le jure devant Dieu !…

Dans les yeux de Béatrice, une flamme de colère brilla. Ses fins sourcils se froncèrent. Elle se leva et s’approcha de Bellincioni, son lourd regard toujours posé sur lui.

— Ne mens pas. Je sais tout. Donne-moi les lettres du