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devait être seul chez lui à cette heure, et appela le page Ricciardetto qui se tenait à la porte.

— Ordonne à deux porteurs de m’attendre avec un palanquin dans le parc, près de la porte secrète du palais. Seulement, si tu veux me plaire, que personne n’en sache rien ? tu entends ?… personne !

Elle lui donna sa main à baiser. L’adolescent courut exécuter les ordres.

Béatrice revint dans la chambre, jeta sur ses épaules un manteau de martre, assujettit sur son visage un masque de soie noire, et quelques minutes après se trouva dans son palanquin qui prenait la direction de la porte Ticcini où habitait Bellincioni.


VI

Le poète appelait sa vieille maison, à moitié en ruines, une « niche à grenouilles ». Il recevait de nombreux cadeaux, mais menait une vie de désordres, buvait ou jouait tout ce qu’il possédait, et c’est pourquoi la pauvreté, selon l’expression de Bellincioni lui-même, le poursuivait « comme une épouse fidèle et détestée ».

Couché sur son lit à trois pieds, avec une bûche en guise de quatrième, sur un matelas crevé, mince comme une crêpe, il achevait de boire un troisième