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Étendue sur ses coussins, telle Cléopâtre ou la reine de Saba, monna Lena lisait l’épître, accompagnée d’un sonnet, qu’un jeune évêque, amoureux de sa beauté, lui avait dédiée, et qui se terminait par ces vers :


Quand j’écoute tes discours charmeurs,
Ô divine Lena je quitte ces lieux
Mon âme s’envole vers les célestes splendeurs
Des idées platoniciennes et des éternels cieux.


La courtisane méditait un sonnet en réponse. Elle maniait le vers dans la perfection et disait à bon droit que, s’il ne dépendait que d’elle, elle passerait tout son temps nell’Accademia degli uomini virtuosi, à l’Académie des hommes vertueux.

L’armée sacrée entoura le palanquin. Le capitaine d’une compagnie, Dolfo, s’avança, éleva au-dessus de sa tête la croix rouge et s’écria solennellement :

— Au nom de Jésus, roi de Florence, et de la Vierge Marie, notre reine, nous t’ordonnons d’enlever ces coupables ornements, ces frivolités et ces anathèmes. Si tu ne le fais, tu seras punie de maladie !

Le chien s’éveilla, aboya ; la guenon grogna et le perroquet battit des ailes en criant le vers que lui avait appris sa maîtresse :

Amor, c’ha nullo amato amar perdona !

Lena s’apprêtait à faire signe aux gardes du corps pour disperser cette foule, lorsqu’elle aperçut l’enfant. Elle l’appela de la main.

Le gamin approcha, les yeux baissés.