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comme tu aimes ta patrie terrestre ! Console-toi, ce qui périra dans le bûcher sera digne du feu, car ce qui est mauvais et coupable ne peut être beau, selon l’opinion même de vos sages.

— Êtes-vous convaincu, mon père, demanda Cipriano, que les enfants puissent distinguer infailliblement ce qui est bon ou mauvais dans les productions artistiques et scientifiques ?

— La vérité sort de la bouche des enfants, répliqua le moine. Si vous ne pouvez être semblable à eux, vous ne pourrez entrer dans le royaume céleste. Je vaincrai la sagesse des sages, les raisons des raisonneurs, a dit le Seigneur. Nuit et jour je prie pour eux, afin que ce qu’ils ne pourront comprendre dans les vanités de l’art et de la science leur soit révélé par l’Esprit saint.

— Je vous en supplie, réfléchissez, conclut Buonaccorsi se levant. Peut-être une certaine partie…

— Pas de mots inutiles, messer, interrompit Savonarole, ma décision est inébranlable.

Cipriano marmonna quelque chose entre ses mâchoires édentées. Savonarole n’entendit que le dernier mot :

— Folie !…

— Folie ! s’écria-t-il, et ses yeux étincelèrent. Le Veau d’or des Borgia offert en des fêtes impies au pape, n’est-ce pas de la folie ? Le Clou sacré élevé à la gloire de Dieu par une diabolique machine par ordre de Ludovic le More, le meurtrier, le ravisseur du trône, n’est-ce pas de la folie ? Vous dansez autour du Veau