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Et Giovanni désirait qu’en lui s’accomplît le miracle dont parlait Savonarole, que des rayons de feu, jaillissant du saint ciboire, marquassent sur son corps, comme au fer rougi, les grandes blessures en croix.

Gesù, Gesù, amore ! soupirait-il, exténué de langueur.

Une fois, Savonarole, ainsi qu’il le faisait avec les autres novices, l’envoya soigner un malade à la villa Careggi, à deux milles de Florence, cette même villa où longtemps vécut et mourut Laurent de Médicis. Dans l’une des pièces abandonnées du palais, où ne filtrait qu’un jour sépulcral à travers les fentes des volets, Giovanni vit un tableau de Sandro Botticelli, la Naissance de Vénus. Toute blanche, pareille à un lis, moite, sentant la brise saline, elle glissait sur les flots, debout dans une coquille de perle. Ses lourds cheveux blonds ondulaient comme des serpents. D’un mouvement pudique, elle les retenait contre elle, pour voiler sa nudité, et son corps superbe respirait la tentation du péché, tandis que ses lèvres innocentes et ses yeux enfantins exprimaient une étrange tristesse.

Le visage de la déesse n’était pas inconnu à Giovanni. Longtemps il le regarda et se souvint qu’il avait vu les mêmes traits dans un autre tableau de ce même Botticelli, la Sainte Vierge. Une inexprimable émotion emplit son âme. Il baissa les yeux et quitta la villa.

En descendant vers Florence il suivait une étroite impasse. Il remarqua, dans le renfoncement d’un vieux