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Lorsqu’il fut entré dans la cellule, fra Sylvestre s’assit à terre dans un coin et, grattant ses jambes nues et rouges, chantonna une mélodie monotone. Son visage, couvert de taches de rousseur, avait une expression de bêtise et de tristesse, son petit nez était pointu comme une alène, sa lèvre inférieure pendait, et ses yeux verts, brouillés, semblaient toujours pleurer.

— Frère, dit Savonarole, un messager secret du pape vient d’arriver de Rome. Dis-moi, dois-je le recevoir et que dois-je lui répondre ? N’as-tu pas eu de vision ? N’as-tu pas entendu des voix ?

Maruffi fit une grimace, aboya comme un chien, puis grogna comme un cochon ; il avait le don d’imiter tous les animaux.

— Frère chéri, suppliait Savonarole, sois bon, dis un mot ! Mon âme est mortellement triste. Prie Dieu qu’il t’envoie l’inspiration divine.

L’hystérique tira la langue et son visage se contracta.

— Pourquoi m’ennuies-tu, siffleur enragé, caille sans cervelle, tête de mouton ! Hou !… que les rats rongent ton nez ! cria-t-il en un inopiné accès de colère. Tu as mis la soupe à cuire, mange-la. Je ne suis ni ton prophète ni ton conseiller !

Il regarda en dessous Savonarole, soupira et continua d’une voix plus douce, presque tendre :

— J’ai pitié de toi, frérot, oh ! que j’ai pitié de toi, bêta… Et pourquoi crois-tu que mes visions viennent de Dieu et non pas du diable ?

Sylvestre se tut, ferma les yeux, et son visage devint