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de Peretola me racontait que, depuis son enfance, Léonard ne mange pas de viande et dit qu’un temps viendra où tous les hommes, à son instar, se contenteront de légumes ; le meurtre des animaux est à son avis aussi blâmable que celui des gens. Passant devant une boutique de boucher sur le Mercato Nuovo, et me montrant avec dégoût les corps éventrés des veaux, des moutons, des bœufs et des porcs, il me dit :

— En vérité, l’homme est le roi des animaux, ou plutôt le roi des brutes, re delle bestie, car rien n’égale sa cruauté.

Que Dieu me pardonne, de nouveau je n’ai su résister, j’ai suivi Cesare dans ce maudit cabaret. J’ai parlé de la charité du maître.

— Est-ce de celle, Giovanni, qui pousse messer Leonardo à ne se nourrir que d’herbes ?

— Quand bien même, Cesare ? Je sais…

— Tu ne sais rien du tout ! m’interrompit-il. Messer Leonardo ne fait point cela par bonté ; il s’amuse simplement comme avec tout le reste, c’est un original, un fanatique.

— Comment, un fanatique ? Que dis-tu ?

Il rit et avec une gaieté forcée :

— Bon, bon, ne discutons pas. Attends, quand nous rentrerons, je te montrerai les curieux dessins du maître…

En effet, de retour à la maison, doucement, comme