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Il ne parle presque jamais des femmes. Une fois seulement il a dit que les hommes les traitaient aussi illégalement que des bêtes. Cependant il se moque de l’amour platonique. Cesare assure que durant toute sa vie, Léonard a été à ce point occupé de la mécanique et de la géométrie, qu’il n’a pas eu le temps d’aimer les femmes, mais que, cependant, il ne le croyait pas vierge, car il avait dû sûrement aimer une fois, non comme tous les mortels, mais par curiosité, par observation scientifique, pour étudier le mystère d’amour, avec le peu de passion et la précision mathématique qu’il apporte à l’examen des autres sciences naturelles.

Par moments, il me semble que je ne devrais jamais parler avec Cesare de Léonard. Nous avons l’air de l’écouter, de le surveiller comme des espions. Cesare éprouve une joie méchante chaque fois qu’il peut jeter une ombre nouvelle sur le maître. Et pourquoi empoisonne-t-il ainsi mon âme ? Maintenant, nous allons souvent dans un mauvais petit cabaret, près de l’octroi maritime. Pendant des heures, devant un demi-broc de vin aigre, nous causons et nous conspirons comme des traîtres, entourés de bateliers qui jurent en jouant aux cartes.